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Retour sur la rencontre du 7 octobre : crédit structuré, CLO et SRT, deux approches différentes

Dernière mise à jour : 8 oct.


Un sujet d'intérêt majeur pour les investisseurs professionnels comme en atteste la présence de 40 professionnels de haut niveau pour participer au débat interactif animé par Maxime Ricomes (Mercer Investments France) avec Thibault Brohard (Selwood AM) et Antoine Lesne (State Street Global Advisors, Head of ETF Strategy & Research EMEA). Merci à tous pour vos analyses pointues et vos regards complémentaires. Des échanges riches, concrets exactement ce qu’il faut pour éclairer les décisions d’allocation. 🙌


La titrisation, un outil essentiel pour le financement de l'économie après la crise


L'univers de la titrisation de risque de crédit, souvent perçu avec méfiance depuis la crise financière de 2008, a connu une profonde transformation et s'affirme aujourd'hui comme un levier crucial, notamment en Europe, pour permettre aux banques de financer l'économie. Deux mécanismes principaux dominent ce marché : les CLO (Collateralized Loan Obligations) et les SRT (Significant/Synthetic Risk Transfer).


Leçons de la crise et l'ère de Bâle III

La crise financière a eu un impact majeur sur la structure du marché et sur sa régulation. Des contreparties clés, telles que les Credit Derivatives Product Company (CDPC) Monoline, ont disparu, modifiant la capitalisation et limitant l'accès au levier de marché. L'incidence la plus significative est toutefois venue des régulations successives, de Bâle 2.5 au début des années 2010 jusqu'à Bâle 3, qui est actuellement en vigueur. Ces règles ont lourdement pénalisé les activités de marché des banques, augmentant drastiquement le coût en capital associé à certains actifs, notamment la dette de crédit.

Le ratio de fonds propres Tier 1 des banques européennes est passé d'environ 6 à 7 % juste après la crise à 12 ou 15 % aujourd'hui. Bien que cette consolidation réduise le risque systémique, elle diminue également la capacité des banques à financer l'économie. Face à cette contrainte, les banques cherchent activement à rationaliser leur bilan. Plutôt que d'augmenter le numérateur (lever des fonds propres, ce qui est dilutif), elles privilégient la réduction du dénominateur, c'est-à-dire une diminution de leurs actifs pondérés par le risque (RWA). C'est dans ce contexte que les transactions SRT et CLO ont pris une importance stratégique.

SRT : l'outil d'optimisation du capital en Europe

Le SRT (Significant Risk Transfer), ou transfert synthétique de risque, est devenu un mécanisme privilégié par les banques européennes pour libérer du capital. Le marché des SRT est d'ailleurs majoritairement européen, représentant environ 80 % des émissions, et connaît une croissance rapide de 20 à 30 % par an depuis le début des années 2010.

Contrairement aux CLO, les SRT impliquent un transfert de risque synthétique : les actifs sous-jacents ne quittent pas le bilan de la banque. La banque achète simplement une protection synthétique, conservant ainsi la relation client, l'origination des prêts et sa présence sur le marché.

Les portefeuilles sous-jacents aux SRT sont extrêmement variés, allant des prêts hypothécaires au financement maritime, mais les prêts aux entreprises (corporate loans) constituent la majorité du marché. Fait notable, ces portefeuilles sont majoritairement classés investment grade selon les notations internes des banques (souvent 65 % à 90 % investment grade). Ils offrent également une très grande diversification, pouvant inclure 2000 à 8000 noms sous-jacents, y compris des PME, reflétant fidèlement le portefeuille de prêts de la banque.

Pour l'investisseur, le SRT est souvent perçu comme une forme de joint-venture avec la banque. L'investisseur prend la tranche la plus junior (tranche equity, par exemple 0 à 7 % ou 0 à 9 % du notionnel), en échange d'un coupon flottant attractif (actuellement entre 7 % et 9 % sur les tranches equity).

Le SRT est avant tout un marché primaire et privé, conçu pour être conservé jusqu'à maturité (approche buy and hold). La liquidité secondaire est très limitée, ce qui a pour avantage de protéger sa valorisation des stress de marché extrêmes et de lier sa performance à la valeur fondamentale du crédit plutôt qu'au risque de liquidité, un avantage notable par rapport à d'autres instruments plus liquides.

CLO : un marché plus mature et la montée des ETF

Les CLO (Collateralized Loan Obligations) représentent l'autre pilier de la titrisation. Contrairement aux SRT, les CLO impliquent la vente physique d'un portefeuille de prêts (principalement des prêts d'entreprises) à un véhicule ad hoc (SPV), qui émet ensuite des obligations.

Le marché des CLO est historiquement beaucoup plus développé aux États-Unis, où il atteint environ 1300 milliards de dollars, contre seulement 300 milliards de dollars pour les émissions en euros.

La structure des CLO repose sur une graduation du risque en tranches (allant de Triple A à la tranche equity). En Europe, il n'y a eu aucun défaut historique sur les tranches Triple A. Pour prévenir les abus observés en 2008, les régulations exigent désormais que les gérants de CLO conservent une partie du risque sur les tranches juniors (skin in the game), alignant ainsi les intérêts.

Récemment, le marché européen a vu l'émergence des ETF de CLO, principalement concentrés sur les tranches Triple A. Ces fonds offrent une liquidité quotidienne et permettent aux investisseurs d'accéder facilement à un marché par ailleurs complexe. Malgré des sorties de fonds importantes observées aux États-Unis lors de stress (comme en mars 2020), la liquidité sur les tranches Triple A s'est maintenue, avec des bid-ask spreads serrés (autour de 25 points de base en euros).

Transparence et gestion du risque

Que ce soit pour les SRT ou les CLO, le risque principal reste le risque de crédit lié au portefeuille sous-jacent.

Pour les SRT, le transfert étant synthétique et passif, l'analyse porte essentiellement sur la qualité de la banque émettrice et de ses mécanismes de sélection des prêts. Bien qu'il soit possible d'accéder aux données détaillées des sous-jacents (rating interne, probabilité de défaut) pour les grandes entreprises, l'agrégation statistique est utilisée pour les portefeuilles massifs de PME.

Pour les CLO, le portefeuille est géré activement par le gestionnaire. La transparence est élevée, car les documents du SPV sont accessibles, permettant d'analyser l'exposition par pays et par secteur.

Globalement, ces instruments sont considérés comme essentiels pour l'écosystème financier. En libérant du capital bancaire, ils permettent à ces institutions de continuer à jouer leur rôle de financement de l'économie, des grandes entreprises aux PME, compensant ainsi la moindre capacité de prêt résultant des exigences réglementaires accrues.


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